Les incendies dévastent l’Aude et l’ensemble du sud de l’Europe

Le 10 août, la préfecture de l’Aude a annoncé que les sapeurs-pompiers avaient maîtrisé l’incendie qui dévastait ce département depuis presque une semaine. La colère monte toutefois à travers le sud de la France et de toute l’Europe, touché par des incendies liés au réchauffement climatique.

Alors que les pays d’Europe augmentent leurs budgets militaires à la hauteur de centaines de milliards d’euros pour faire la guerre à la Russie, les pouvoirs publics refusant de mettre les moyens nécessaires pour combattre les incendies et à plus forte raison la crise climatique.

Dans l’Aude, une femme est décédée chez elle, 25 personnes ont été blessées, dont 20 sapeurs-pompiers. Le bilan matériel de l’incendie dans l’Aude fait état de 36 habitations détruites, 20 autres endommagées, et 62 véhicules détruits. Ce feu, en ravageant 16.000 hectares de forêt, de zones agricoles et d’habitations, est devenu le plus grand incendie du siècle en France, dépassant le niveau de celui de 1949.

L’accès à l’électricité aurait été rétabli à travers tout le département, mais les réseaux téléphoniques et l’eau potable posent toujours problème. Les autorités ont émis des recommandations de ne pas consommer l’eau du robinet dans les communes de Durban, Coustouge, Villesèque-des-Corbières, Thézan, Jonquières, Quintillan, Villeneuve-les-Corbières, et Fontjoncouse.

Alors que la canicule touche encore ce département, environs mille sapeurs-pompiers renforcés par 58 militaires travaillent à éviter de nouveaux départs de feu. Selon la préfecture de l’Aude, ils ont «pour mission de travailler sur les points chauds en appui des pompiers et de la sécurité civile».

Poussés par ces conditions climatiques, les feux de forêt touchent l’ensemble du pourtour méditerranéen de l’Europe. Dans la péninsule ibérique, une série d’incendies importants a forcé l’évacuation de milliers de personnes, notamment dans les régions de Tarifa dans le sud de l’Espagne et autour de Las Medulas en Castile, et à Trancoso au Portugal.

En Grèce, un vaste incendie de forêt s’est déclaré à Keratea, au sud d’Athènes, et a dévasté la région de l’Attique, faisant au moins un mort. Les autorités grecques ont émis des ordres d’évacuation, alors qu’au moins 260 pompiers appuyés par de nombreux volontaires civils luttaient contre le feu.

En Albanie, où près de 34.000 hectares ont brûlé depuis juillet, l’État a déployé environ 800 soldats pour aider les sapeurs-pompiers face à 14 foyers actifs d’incendie. Sept hélicoptères et bombardiers d’eau émiratis, tchèques, slovaques, croate et grecs ont participé à l’opération, selon le ministère albanien de la Défense.

Des feux de forêt se sont également déclarés dans les régions de Çanakkale et de Bayramiç en Turquie, où les autorités ont dû reloger au total 654 habitants.

Les incendies qui dévastent le sud de l’Europe ne sont pas des problèmes locaux qui peuvent être résolus à l’échelle nationale, mais le produit de l’incapacité du système capitaliste d’Etats-nation d’affronter la crise climatique mondiale. Celle-ci est sans question à l’origine de la vague internationale d’incendies et de canicules qui touchent l’ensemble de l’Europe.

Richard Allan, professeur à l'université britannique de Reading, a dit à FranceInfo que la canicule qui commence «à atteindre le Royaume-Uni, est étonnamment puissante par rapport aux données historiques. Pourtant, des vagues de chaleur plus étendues, plus longues et plus fréquentes sont une conséquence prévisible de la hausse des concentrations de gaz à effet de serre dans l'atmosphère, principalement due à notre utilisation des combustibles fossiles.»

Ceci a créé les conditions pour l’incendie inédit qui s’est déclaré dans l’Aude, a expliqué Benoît Reymond, expert national du pôle Défense des forêts contre l’incendie (DFCI) de l’Office national des forêts: «Sur les sept ou huit premières heures, il a parcouru 10.000 hectares. C’est presque deux fois plus que l’incendie de Gonfaron en 2021, qui était déjà hors norme. On ne peut pas encore donner d’indication sur sa vitesse exacte, mais elle devrait dépasser les 5 km/h en moyenne.»

«Ce sont clairement les conséquences directes du changement climatique, qu'on anticipe depuis plusieurs années maintenant», a-t-il poursuivi. Le réchauffement climatique et le déssèchement qu’il crée «sont fatales pour la végétation. Les arbres subissent des contraintes climatiques qu'ils n'ont jamais rencontrées durant toute leur vie.» Les feux peuvent ensuite partir très facilement dans des conditions où la végétation est extrêmement sèche.

Déjà, lors des incendies de 2021, le professeur Levent Kurmaz de l’Université Bogazici à Istamboul expliquait au quotidient britannique Independent: «Tout autour de la Méditerranée nous aurons un climat désertique à la fin du siècle. … Le climat du sud de la Turquie, comme de la Grèce et de l’Italie sera similaire à celui du Caire ou de Bassorah dans le sud de l’Irak.»

Selon les projections actuelles de Météo-France, avec 2,7°C de réchauffement mondial, le nombre de jours à risque élevé d’incendie serait multiplié par deux en. En 2100, avec une augmentation de 4°C selon certains scénarios, «toute la France fera face à un risque élevé de feu, la moitié nord dans les mêmes proportions que le pourtour méditerranéen actuellement, et le Sud deux fois plus qu'aujourd'hui», rapporte l’agence.

Ce désastre n’est pas inévitable, mais c’est vers ce résultat que tend la politique des grandes puissances capitalistes. Poussés par leurs intérêts nationaux réactionnaires, ils ne peuvent réaliser la coordination et la planification économiques nécessaires à une réduction mondiale des émissions à effet de serre. Ayant gaspillé des centaines de milliards d’euros sur leur guerre avec la Russie en Ukraine, les pays de l’OTAN imposent à présent une austérité massive, mais ils prennent l’argent des travailleurs pour militariser la société, non pas résoudre la crise climatique.

L’irrationalité écologique de l’impérialisme est souligné par le fait que l’Europe et les Etats-Unis coupent leur commerce avec les pays émergents comme la Chine, qui concentrent une grande part de la production mondiale d’infrastructures énergétiques sans émission à effet de serre.

La colère monte parmi les travailleurs contre la gestion catastrophique des ressources par la classe dirigeante. Suite à l’incendie qui a touché le quartier de l’Estaque au nord de Marseille et ravagé 750 hectares au total, un collectif d’habitants a porté plainte pour dénoncer l’abandon des habitants par les pouvoirs publics et exiger des réponses sur la gestion officielle de la crise.

L’un d’eux, Adrien, a dénoncé l’impréparation des secours et l’absence d’évacuation organisée par les pouvoirs publics: «Ma femme m’a appelé, paniquée. Il y avait un 4x4 de pompiers sans aucune lance, ni rien. Et les flammes à cinq mètres. Avec un bébé dans les bras, forcément, on est partis en courant. … On a reçu un SMS de confinement. Mais quand le feu lèche votre jardin, vous fuyez.»

Sa voisine, Dominique, a dit: «J’ai eu peur. Il n’y avait personne. Pas d’alerte, pas d’hélicoptère. Le feu, je connais. Ce qui m’a traumatisée, c’est le silence. … Porter plainte, c’est chercher à guérir, on veut comprendre, avoir des réponses.»

Une réponse à la crise écologique passe par la construction d’un mouvement international parmi les travailleurs visant à ôter le pouvoir à l’oligarchie capitaliste en perdition, et à mettre les ressources technologiques et industrielles du monde sous le contrôle démocratique des travailleurs afin de répondre aux besoins sociaux essentiels de l’humanité.

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