Le cabinet de sécurité nationale israélien a approuvé vendredi un plan visant à prendre le contrôle de la ville de Gaza, occupant de fait l’ensemble de la bande de Gaza en préparation de son annexion par Israël.
« Nous sommes en train d'effacer l'État palestinien », a déclaré vendredi le ministre des Finances Bezalel Smotrich en réaction à la décision. « D’abord par les actes, puis officiellement. »
Le cabinet de sécurité nationale israélien a approuvé une série d’objectifs de guerre. Parmi ces objectifs figure l’exclusion explicite du Hamas et de l’Autorité palestinienne de toute gouvernance future du territoire. Le plan prévoit à la place la « mise en place d’une autre administration civile »
Lors d’une interview diffusée jeudi sur Fox News, le premier ministre israélien Benjamin Nétanyahou a été interrogé sur l’intention d’Israël de prendre le contrôle total de Gaza. Il a répondu sans détour : « Nous en avons l’intention. »
Commentant la portée de la décision, le Financial Times a écrit que la mesure « ouvre la voie à une prise de contrôle de l’enclave palestinienne par Israël pour la deuxième fois depuis la guerre de 1967, laissant la nation en contrôle effectif de tous les territoires entre le Jourdain et la mer Méditerranée ».
L’occupation totale de Gaza constitue la condition militaire préalable au plan américano-israélien visant à transférer l’ensemble de la population de Gaza dans des camps de concentration en vue de leur déplacement forcé vers d’autres pays.
En février, Donald Trump a déclaré : « Les États-Unis vont prendre le contrôle de la bande de Gaza », « la raser complètement » et disperser la population palestinienne de Gaza vers « d’autres pays ».
En mai, le ministre israélien des Finances Bezalel Smotrich a déclaré : « D’ici un an [...] Gaza sera entièrement détruite, les civils seront envoyés [...] vers le sud dans une zone humanitaire [...] et de là, ils commenceront à partir en grand nombre vers des pays tiers. »
Vendredi, Donald Trump a déclaré que les États-Unis « travaillent » sur une proposition visant à transférer le peuple palestinien vers le Somaliland. Un journaliste lui a demandé : « Vous avez parlé de réinstaller les Gazaouis. Le Somaliland a exprimé un intérêt potentiel si vous reconnaissiez son indépendance. »
Trump a répondu : « Nous examinons cela en ce moment [...] Nous y travaillons activement. »
Au début de la semaine, le Financial Times a rapporté que des consultants du Boston Consulting Group, un important groupe américain de conseil aux entreprises, avaient travaillé sur des modèles de relocalisation du peuple palestinien en Somalie et au Somaliland, dans le cadre d'une proposition initialement présentée par l'administration Trump au début de l'année. Le FT a rapporté que « plusieurs destinations potentielles figuraient dans un tableau complexe créé pour le compte d'hommes d'affaires israéliens qui élaboraient des plans pour le réaménagement de Gaza après la guerre entre le Hamas et Israël ».
La ville de Gaza, dans le nord de l'enclave, compte actuellement environ 1 million de personnes, dont la plupart ont déjà été déplacées à plusieurs reprises au cours de la guerre qui dure depuis 22 mois. Avant le génocide, elle avait déjà une densité de population plus élevée que celle de New York, et sa population n'a fait qu'augmenter lorsque les gens s’y sont réfugiés pour fuir d'autres régions du pays.
Les quelque 2 millions de résidents restants de Gaza ont été déplacés de force à plusieurs reprises et vivent en grande partie dans des tentes ou des bâtiments détruits. Selon les statistiques du ministère de la Santé du gouvernement de Gaza, 61 000 personnes ont été tuées depuis le début du génocide.
Le secrétaire général de l’ONU, António Guterres, a condamné le projet d’occupation de la ville de Gaza, le qualifiant de « dangereuse escalade ». Il a déclaré que cette décision « entraînera de nouveaux déplacements forcés, des tueries et une immense destruction, aggravant les souffrances inimaginables de la population palestinienne à Gaza ». L’occupation de la ville devait être achevée d’ici le 7 octobre.
Dans une déclaration, la secrétaire générale d’Amnesty International, Agnès Callamard, a qualifié le projet d’occupation de la ville de Gaza d’« absolument scandaleux et révoltant », ajoutant : « Rien ne peut justifier les atrocités de masse supplémentaires qu’une opération militaire élargie dans la ville de Gaza entraînera. »
Elle a conclu :
Alors que nous pensions avoir déjà assisté aux chapitres les plus cruels et les plus douloureux de ce génocide – à travers l’usage continu et intensifié de la famine comme méthode de guerre par Israël – les plans visant à intensifier les opérations militaires dans la ville de Gaza indiquent que le pire est encore à venir.
Michael Lynk, ancien rapporteur spécial de l'ONU sur les droits de l'homme dans le territoire palestinien occupé, a déclaré à Al Jazeera :
Vous savez, et je sais qu'au cours des six derniers mois, nous avons entendu un refrain constant venant des États-Unis et d'Israël en ce qui concerne la volonté de voir la population palestinienne de Gaza soit « réduite» [...] ou peut-être complètement supprimée. Tout cela serait certainement un crime de guerre, très probablement aussi un crime contre l'humanité. Et si cela fait partie d'un objectif plus large d'essayer de détruire un peuple, en tout ou en partie, alors il s’agit également d’un génocide.
Dans une déclaration distincte, le Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme, Volker Türk, a affirmé que l’occupation de la ville de Gaza « va à l’encontre de la décision de la Cour internationale de justice, qui exige qu’Israël mette fin à son occupation dans les plus brefs délais, qu’il œuvre à la réalisation de la solution à deux États convenue, et qu’il respecte le droit du peuple palestinien à l’autodétermination ».
Dans une déclaration publiée le 29 juillet, le Cadre intégré de classification de la sécurité alimentaire, reconnu par l’ONU, a averti que « Le scénario de famine le plus catastrophique est actuellement en train de se produire dans la bande de Gaza. »
Il a ajouté :
Tout démontre de plus en plus que la famine, la malnutrition et les maladies généralisées provoquent une augmentation des décès liés à la faim. Les dernières données indiquent que les seuils de famine ont été atteints pour la consommation alimentaire dans la majeure partie de la bande de Gaza, ainsi que pour la malnutrition aiguë dans la ville de Gaza.
(Article paru en anglais le 9 août 2025)