Le gouvernement allemand salue l'escalade par Trump de la guerre contre la Russie

Le secrétaire américain à la Défense Pete Hegseth (deuxième à droite) rencontre le ministre allemand de la Défense Boris Pistorius (à gauche) au Pentagone, le lundi 14 juillet 2025, à Washington. [AP Photo/Mark Schiefelbein]

En annonçant la fourniture à l'Ukraine d'armes d'une valeur pouvant atteindre 10 milliards de dollars, le président Donald Trump a inversé la politique officielle de son administration concernant la guerre de l'OTAN contre la Russie. Les nouvelles livraisons comprennent, entre autres, des systèmes de défense aérienne Patriot et des missiles longue portée capables d'atteindre les principales villes russes.

Rares sont les gouvernements qui ont réagi à cette escalade massive avec autant d'enthousiasme que celui de l'Allemagne. Immédiatement après l'annonce de Trump, le chancelier Friedrich Merz (Union chrétienne-démocrate, CDU) a déclaré sur X : « Le président Trump a pris aujourd'hui une initiative importante : les États-Unis fourniront massivement des armes à l'Ukraine si leurs partenaires européens financent ce projet. […] Je lui ai assuré que l'Allemagne apporterait une contribution décisive. »

Selon ses propres déclarations, le gouvernement allemand financera au moins deux systèmes Patriot, chacun coûtant environ un milliard d'euros. Au moment de l'annonce de Trump, le ministre de la Défense Boris Pistorius (Union sociale-démocrate, SPD) était déjà à Washington pour des entretiens avec son homologue américain, Pete Hegseth. Ces discussions visaient à établir une étroite coordination technique et logistique. Pistorius a promis : « Nous nous mettrons rapidement au travail. »

Cette évolution marque une escalade qualitative de la guerre et souligne en même temps l'agressivité avec laquelle Berlin se réarme à nouveau contre la Russie, 80 ans après la Seconde Guerre mondiale. Merz a justifié cette décision par ces mots : « Nous agissons dans notre propre intérêt. » La pression sur Moscou, a-t-il déclaré, doit s'accroître.

Le discours officiel selon lequel il s'agit d'une mesure défensive contre la « terreur des bombardements » est de la pure propagande. L'invasion réactionnaire de l'Ukraine par la Russie ne change rien au fait que les puissances impérialistes ont provoqué systématiquement cette guerre pendant des années. Depuis la dissolution de l'Union soviétique, l'OTAN s'étend vers l'est pour encercler militairement la Russie. L'Allemagne, qui joue traditionnellement un rôle de premier plan dans les plans de militarisation de l'UE, se place désormais en première ligne de cette escalade.

La paix est le dernier des soucis de l'impérialisme allemand. Comme lors des guerres mondiales du XXe siècle, les élites dirigeantes poursuivent des intérêts économiques et géopolitiques, notamment le contrôle de l'Ukraine, riche en ressources, et l'assujettissement de la Russie même. Dans sa dernière déclaration de politique générale (article en anglais), Merz a qualifié le gouvernement russe de «régime criminel» menaçant l'Europe. Il a déclaré: «Les moyens diplomatiques sont épuisés.»

Cela équivaut à une déclaration de guerre. Lorsque les moyens diplomatiques sont épuisés, l'heure de la guerre sonne. Dès l'automne 2023, Pistorius évoquait la nécessité pour l'Allemagne d’être ‘kriegstüchtig’ (bonne à la guerre). Avec des crédits de guerre d'environ 1 000 milliards d'euros et une augmentation prévue des dépenses militaires à 5 pour cent du PIB, le réarmement est devenu doctrine d'État.

L'objectif est de faire de la Bundeswehr « l'armée conventionnelle la plus puissante d'Europe », un objectif que Merz a ouvertement annoncé à plusieurs reprises. Pistorius exige une hausse rapide d'au moins 50 000 à 60 000 soldats des effectifs de la Bundeswehr, objectif difficilement atteignable sans réintroduire la conscription. Dimanche, le président allemand Frank-Walter Steinmeier s'est de nouveau prononcé en faveur de cette mesure sur la chaîne publique ZDF. Il s'est déclaré « partisan de la conscription » et a affirmé que la Bundeswehr devait augmenter ses effectifs pour relever les nouveaux « défis ».

Parallèlement, un réarmement matériel de grande ampleur est en cours. Selon les médias, Berlin prévoit notamment l'acquisition d'environ 1 000 chars de combat Leopard et de 2 500 véhicules blindés Boxer, pour un coût d'au moins 25 milliards d'euros. Les carnets de commandes de l'industrie d'armement incluent également de nouveaux navires de guerre, des avions de combat, des drones, des missiles et de vastes quantités de munitions.

Dans un contexte où Berlin n'a pas encore établi sa propre économie de guerre, elle reste dépendante de la technologie américaine. Pistorius négocie actuellement avec Washington l'acquisition du système Typhon, capable de tirer des missiles de croisière Tomahawk et des missiles à courte portée SM-6. Ces systèmes d'armes ont une portée d'environ 2 000 kilomètres et peuvent ainsi atteindre le territoire russe, y compris Moscou.

Selon Pistorius, le système – que l'armée américaine elle-même prévoit de déployer en Allemagne à partir de 2026 – pourrait également être adopté de manière permanente par la Bundeswehr. Celle-ci serait alors en mesure d'attaquer directement la puissance nucléaire russe depuis le sol allemand, un scénario qui fait apparaître le danger d'une confrontation nucléaire dévastatrice.

L'alliance germano-américaine actuelle en matière d'armement est plus que fragile. Les mesures protectionnistes de Trump et l'escalade de la guerre commerciale – l'UE a déjà répondu aux dernières menaces tarifaires de Washington par une liste de mesures de rétorsion potentielles – pourraient rapidement se transformer en hostilité ouverte. C'est précisément pour cette raison que Berlin utilise la coopération encore existante pour se positionner de manière indépendante, tant sur le plan stratégique que militaire.

Au cœur du réarmement allemand, il y a l'offensive guerrière contre la Russie. Dans un communiqué de presse conjoint avec Hegseth, Pistorius s'est vanté que l'Allemagne « augmenterait significativement ses dépenses de défense à 5 pour cent de son PIB». Selon le plan budgétaire, 3,5 pour cent doivent être consacrés aux «dépenses de défense essentielles» d'ici 2029. De plus, la brigade de la Bundeswehr en Lituanie – une unité de combat allemande permanente dotée d'armes lourdes, de sa propre base et de personnel stationné en permanence – sera «opérationnelle d'ici 2027».

Le symbolisme historique est indéniable : la Lituanie, ancien territoire soviétique, fut un théâtre majeur de crimes nazis. Après l'invasion de la Wehrmacht en juin 1941, des collaborateurs locaux y participèrent activement à l'extermination quasi totale de la population juive. Aujourd'hui, les États baltes et toute l'Europe de l'Est servent à nouveau de terrain d'affrontement militaire avec la Russie. Et, une fois de plus, l'impérialisme allemand coopère avec des éléments d'extrême droite et néofascistes.

Peu avant d'accompagner Pistorius aux États-Unis, le général de division Christian Freuding, chef de l'état-major spécial pour l'Ukraine au ministère de la Défense, était à Kiev. Ce même Freuding qui, quelques semaines auparavant, avait commémoré le 80e anniversaire de la défaite de l'Allemagne dans la Seconde Guerre mondiale avec un commandant néo-nazi ukrainien, avait promis à l'Ukraine des centaines de systèmes d'armes à longue portée. Il avait évoqué un «montant à trois chiffres» au journal télévisé ‘‘Heute Journal’’ de la chaîne ZDF.

Freuding a ouvertement déclaré que ces armes étaient destinées à des frappes à longue portée dans l'arrière-pays russe: «Nous avons besoin de systèmes d'armes capables de pénétrer profondément dans le territoire russe, capables d'attaquer des installations de commandement, des aérodromes et des avions.» Les premiers systèmes doivent déjà être livrés fin juillet.

L'impérialisme allemand, qui a déjà tenté de soumettre la Russie dans les deux guerres mondiales du XXe siècle et commis pour ce faire les plus grands crimes de l'histoire de l'humanité, se prépare une fois de plus à une guerre meurtrière. S'adressant au Financial Times, Pistorius a souligné que les troupes allemandes seraient prêtes à tuer des soldats russes si Moscou attaquait un membre de l'OTAN. «Si la dissuasion ne fonctionne pas et que la Russie attaque, cela se produira-t-il? Oui», a-t-il menacé. «Je vous recommande d'aller à Vilnius et de parler aux représentants de la brigade allemande sur place. Ils savent exactement ce qu'ils ont à faire» a-t-il poursuivi.

(Article paru en anglais le 18 juillet 2025)

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