Perspectives

Bombardement de l'Iran par l'impérialisme américain: un jour qui portera la marque de l'infamie

Un bombardier furtif B-2 survole la pelouse sud de la Maison-Blanche, le samedi 4 juillet 2020, à Washington. [AP Photo/Alex Brandon]

Le 22 juin 2025 est un jour qui restera marqué par l’infamie. Lors d'une attaque massive et non provoquée, les États-Unis ont lancé une attaque sournoise contre l'Iran, larguant sur les installations nucléaires iraniennes les bombes anti-bunker non nucléaires les plus puissantes jamais utilisées en situation de combat. Cet acte d'agression est une continuation et une intensification du génocide lancé par Israël à Gaza et soutenu par les États-Unis, et menace d'embraser tout le Moyen-Orient, de mettre le monde à feu et à sang.

Baptisé «Opération Midnight Hammer», cet assaut fut mené avec plus de 125 avions, dont au moins huit bombardiers furtifs B-2 Spirit, soutenus par des avions de chasse, des ravitailleurs et des avions de surveillance, pour ce qui a été la plus grande opération de frappe de B-2 de l'histoire des États-Unis.

La pièce maîtresse de l'attaque fut le déploiement de la bombe massive pénétrante (MOP) GBU-57A/B, une bombe anti-bunker de 13,6 tonnes – l'arme non nucléaire la plus puissante de ce type jamais utilisée. Douze MOP furent larguées sur le site d'enrichissement d'uranium de Fordow, massivement fortifié, et deux autres sur Natanz. Elles furent accompagnées de nombreux missiles Tomahawk de 1 270 kg, qui s'abattirent sur ces deux installations ainsi que sur le complexe de recherche d'Ispahan.

Le président américain Donald Trump a justifié son attaque dans une diatribe homicidaire et mensongère de quatre minutes, prononcée samedi soir. Annonçant que les forces américaines avaient frappé trois installations nucléaires, il a affirmé qu'elles faisaient partie d'une «entreprise horriblement destructrice» qui était prétendument nécessaire pour «stopper la menace nucléaire» posée par l'Iran.

En réalité, ces sites font partie du programme nucléaire civil iranien, développé conformément au Traité de non-prolifération nucléaire (TNP) et soumis à une inspection internationale. Pendant des années, les services de renseignement américains ont estimé que l'Iran ne cherchait pas activement à se doter d'armes nucléaires. Mais, dans la lignée des mensonges du gouvernement Bush sur des « armes de destruction massive » irakiennes, Trump a une fois de plus invoqué des menaces fabriquées de toutes pièces pour justifier des actes d'agression incroyablement irresponsables et non provoqués.

Trump s'est vanté du «succès militaire spectaculaire» de l'attaque, qu'il entendait devoir servir de message à toute la région, déclarant que «l'Iran, le tyran du Moyen-Orient, doit maintenant faire la paix».

Qualifier l'Iran de «tyran du Moyen-Orient», c’est inverser les rôles. Depuis plus d'un tiers de siècle, l'impérialisme américain est en guerre et mène des opérations de changement de régime dans toute la région, notamment en Irak, en Afghanistan, en Syrie, en Libye et au Yémen. Ces deux dernières années, le gouvernement israélien a mené une guerre génocidaire à Gaza, avec le soutien constant des États-Unis, massacrant des dizaines de milliers de civils innocents. Ce n'était là qu'une répétition générale pour une campagne de massacres encore plus vaste.

Après avoir lancé une frappe militaire non provoquée contre une nation souveraine, en violation flagrante du droit international, Trump exige désormais la «paix»! Il entend par là une «capitulation inconditionnelle», comme il l'a exigé la semaine dernière – c'est-à-dire la soumission du pays à une domination impérialiste directe. Dimanche, Trump a explicitement appelé à un «changement de régime» en Iran, après avoir menacé la semaine dernière d'assassiner l'ayatollah Khamenei.

Trump a déclaré: «Depuis 40 ans», depuis le renversement du Shah soutenu par les États-Unis, «l'Iran répète:“Mort à l'Amérique, mort à Israël”» ; il a clamé que «des centaines de milliers de personnes au Moyen-Orient […] sont mortes directement à cause de sa haine ». Le carnage que Trump impute à l'Iran est en réalité le résultat des guerres et interventions américaines successives, sous des gouvernement démocrates comme républicains, qui ont dévasté des sociétés entières. Ce n'est pas l'Iran qui a infligé des «centaines de milliers» de morts, mais bien les États-Unis.

Les frappes ont été directement coordonnées avec le gouvernement fasciste israélien, qui continue de lancer des attaques de missiles contre l'Iran. Comme l'a déclaré Trump : « Nous avons travaillé en équipe comme aucune autre équipe ne l'avait peut-être fait auparavant. » Juste avant les remarques de Trump, le Premier ministre israélien Benyamin Netanyahou a publié une déclaration saluant les frappes aériennes américaines et remerciant Trump; il a affirmé que les deux hommes poursuivaient une politique de « paix par la force : d'abord vient la force, puis vient la paix. » Autrement dit, le massacre et la terreur doivent précéder la soumission.

Trump a conclu par une menace flagrante de nouvelles violences: «Il y aura soit la paix, soit une tragédie pour l’Iran.[…] N’oubliez pas, il reste beaucoup de cibles ». La prochaine étape logique de cette campagne de destruction est l’utilisation d’armes nucléaires tactiques, une option que le gouvernement Trump a déclaré à plusieurs reprises n’être «pas exclue».

L'attaque de samedi montre clairement que pour l'impérialisme américain il n’existe aucune ‘ligne rouge’ et qu’il ne reculera devant rien. Sa criminalité ne connaît pas de limites. Aucun gouvernement n'a violé le droit international de manière aussi ouverte et flagrante depuis le régime nazi.

Le bombardement de l'Iran est un élément central d’une guerre mondiale qui s'intensifie. Il ne s'agit pas d'alerter sur le danger d'une nouvelle guerre mondiale : celle-ci a déjà commencé. L'impérialisme américain cherche à résoudre sa crise sociale et politique interne, qui s'aggrave, par l'agression militaire. Ayant ciblé l'Iran, la logique de la guerre impérialiste mène inévitablement à une confrontation avec la Chine. Le changement de régime en Iran vise à s'assurer le contrôle incontesté sur le golfe Persique, la mer Caspienne et, plus largement, sur l'ensemble du territoire eurasien – des régions riches en pétrole, en gaz et cruciales pour ses voies commerciales.

Trump a salué ces frappes comme un «succès militaire spectaculaire» mais en réalité il s'est engagé dans une voie catastrophique et totalement irresponsable. Quels que soient les calculs à court terme de la Maison-Blanche et du Pentagone, ils ont désormais lancé une guerre dont ils ne peuvent contrôler les conséquences. Ils ont semé le vent et récolteront la tempête. Comme dans la guerre contre l'Irak lancée en 2003, l'impérialisme américain a rendez-vous avec le désastre, mais à bien plus grande échelle.

Reste à voir comment l'Iran réagira, ainsi que ses proches alliés, la Russie et la Chine. Le Parlement iranien a décidé de fermer le détroit stratégique d'Ormuz, par lequel transite une part importante de l'approvisionnement mondial en pétrole – une mesure qui va bouleverser les marchés mondiaux de l'énergie et pourrait déclencher une récession mondiale. Pendant des années, la passivité du gouvernement bourgeois iranien – marquée par ses appels à la négociation et son refus de toute confrontation directe – a enhardi l'impérialisme américain.

Quelle que soit la réaction immédiate de l'Iran, de la Russie et de la Chine, l'enjeu décisif réside dans la réaction de la classe ouvrière internationale. L'impact le plus significatif et le plus profond de l'attaque de samedi sera celui qu’elle aura sur la conscience de milliards de personnes à travers le monde. Cet acte d'agression impérialiste suscite déjà une indignation massive, exprimée sur tous les réseaux sociaux et lors des premières manifestations ayant eu lieu dimanche aux États-Unis.

La guerre contre l'Iran fait suite à près de deux années d'opposition mondiale croissante au génocide de Gaza. Elle révèle sans l'ombre d'un doute le caractère profondément criminel de la politique étrangère américaine. Les États-Unis sont de plus en plus perçus par des milliards de travailleurs à travers le monde comme un gouvernement criminel agissant en dehors de toute contrainte juridique. Le mythe selon lequel l'impérialisme américain défendait la « liberté» ou la «démocratie» est à jamais enterré.

La guerre va massivement attiser des crises sociales et politiques qui font déjà rage aux États-Unis, en Europe et dans le monde. Elle est le fait d'un régime dirigé par et pour l'oligarchie financière. Tandis qu'il bombarde et assassine à l'étranger, le gouvernement Trump démantèle les droits démocratiques aux État-Unis mêmes et y instaure une dictature politique. Le Parti démocrate, la soi-disant opposition, est paralysé et complice – paralysé par sa peur de la classe ouvrière et complice des visées de l'impérialisme.

Une opposition de masse émerge. Une semaine seulement avant le bombardement de l'Iran, des millions de personnes participaient aux plus grandes manifestations antigouvernementales de l'histoire américaine. La question n'est pas de savoir si l'opposition existe, mais comment l'organiser, la diriger et l'armer d'une perspective politique. L'immense colère et le dégoût suscités par ces bombardements doivent se transformer en mouvement politique conscient de la classe ouvrière, reliant la lutte contre la guerre et la dictature à la lutte contre le capitalisme.

La classe ouvrière est la force sociale qui doit être mobilisée pour mettre fin à la barbarie impérialiste. La guerre criminelle menée contre l'Iran n'est pas une aberration, elle est le fruit de l'ensemble du système capitaliste. Elle doit être stoppée par la lutte mondiale unifiée de la classe ouvrière, organisée au-delà des frontières nationales.

Le Comité international de la Quatrième Internationale et les Partis de l'égalité socialiste qui lui sont affiliés appellent à la fin immédiate de la guerre américano-israélienne contre l'Iran et au démantèlement de toute la machine de guerre impérialiste. Nous exhortons les travailleurs et les jeunes à organiser des manifestations, des débrayages et des grèves dans tous les pays.

L'impérialisme est en train de plonger le monde dans la barbarie et la criminalité. Il ne s'agit pas de réformer un système en faillite, mais de le renverser à travers la lutte consciente et organisée de la classe ouvrière pour le pouvoir. L'alternative à la guerre et à la dictature est le socialisme. Il est nécessaire de construire une nouvelle direction révolutionnaire pour mener ce mouvement et faire du socialisme – le contrôle démocratique de l'économie par la classe ouvrière dans l'intérêt de toute l'humanité – le principe directeur d'un nouvel ordre social.

(Article paru en anglais le 23 juin 2025)

Loading