Des centaines d'écrivains britanniques et irlandais demandent un cessez-le-feu immédiat alors que l'opposition au génocide de Gaza s'intensifie

Plus de 380 écrivains, organisations et figures culturelles ont publié une lettre ouverte affirmant que le gouvernement israélien commet un génocide à Gaza et exigeant un cessez-le-feu immédiat.

Cette lettre fait suite à plusieurs autres déclarations et lettres ouvertes exprimant l'horreur et l'indignation face aux crimes commis à Gaza par le gouvernement fasciste du Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu et la collusion de la Grande-Bretagne avec l'État sioniste. Elle reflète une colère croissante face au soutien sans réserve du Premier ministre Keir Starmer à Israël et à son utilisation des lois antiterroristes contre les manifestants ; et le mépris pour les formules hypocrites et évasives des récentes critiques de la guerre par son gouvernement et son refus de prendre des mesures concrètes.

Organisée par Horatio Clare, Kapka Kassabova et Monique Roffey, la lettre des écrivains inclut des auteurs renommés tels que Zadie Smith, Ian McEwan, Russell T Davies, Hanif Kureishi, Frank Cottrell-Boyce, Irvine Welsh, William Dalrymple, Jeanette Winterson, Brian Eno, Kate Mosse, George Monbiot, Elif Shafak, Scottish PEN, Jonathan Coe, Susie Orbach, Kevin Barry, Benjamin Myers, Andrew O’Hagan, Sarah Bernstein, Philip Marsden, Fiammetta Rocco, Lucy Jones, Monique Roffey, India Knight, Nick Laird, Nina Stibbe, Seán Hewitt, Xiaolu Guo, Chris Power, Joe Dunthorne et Marina Warner.

L'historien William Dalrymple s'exprimant lors de la manifestation de masse à Londres contre le génocide à Gaza, le 17 mai 2025. [Photo: WSWS]

Elle commence par un appel aux peuples de Grande-Bretagne, de la République d'Irlande et du monde entier, soulignant que les déclarations publiques des ministres israéliens Bezalel Smotrich et Itamar Ben Gvir sont l’expression ouverte d'intentions génocidaires. Elle ajoute que des organisations de défense des droits de l'homme, Amnesty International, Médecins Sans Frontières, Human Rights Watch, la Fédération internationale pour les droits de l'homme, le Conseil des droits de l'homme des Nations Unies, et de nombreux autres spécialistes et historiens ont clairement identifié un génocide ou des actes de génocide à Gaza commis par l'armée israélienne sur ordre du gouvernement.

La lettre note que plus de 40 des Rapporteurs spéciaux et experts indépendants de l'ONU ont récemment conclu: «Alors que les États débattent de la terminologie – s'agit-il ou non d'un génocide?-- Israël poursuit sans relâche la destruction de la vie à Gaza, par des attaques terrestres, aériennes et maritimes, déplaçant et massacrant la population survivante en toute impunité.» Les experts avaient déclaré que «personne n'est épargné – ni les enfants, ni les personnes handicapées, ni les mères allaitantes, ni les journalistes, ni les professionnels de la santé, ni les travailleurs humanitaires, ni les otages. Depuis la rupture du cessez-le-feu, Israël a tué des centaines de Palestiniens, beaucoup chaque jour—atteignant un pic le 18 mars 2025 avec 600 victimes en 24 heures, dont 400 étaient des enfants.»

La lettre déclare: «Les Palestiniens ne sont pas les victimes abstraites d'une guerre abstraite... Le terme 'génocide' n'est pas un slogan. Il comporte des responsabilités légales, politiques et morales.»

La lettre attire l'attention sur le concept de «spectateur-approbateur» du Tribunal spécial pour l'ex-Yougoslavie en 2017, qui fait référence à un haut responsable qui regarde, reste silencieux, et dont le silence est interprété comme un feu vert par les auteurs: «Nous refusons d'être un public de spectateurs-approbateurs. Il ne s'agit pas seulement de notre humanité commune et de tous les droits de l'homme; il s'agit de notre aptitude morale en tant qu'écrivains de notre temps, qui diminue chaque jour où nous refusons de parler et de dénoncer ce crime.»

Les écrivains déclarent leur opposition à l'antisémitisme et appellent à la distribution sans restriction de nourriture et d'aide médicale à Gaza par l'ONU, à un cessez-le-feu immédiat, à la libération de tous les otages israéliens et des milliers de prisonniers palestiniens arbitrairement détenus dans les prisons israéliennes ; et à l'imposition de sanctions à Israël s'il n'écoute pas leur appel. La lettre conclut: «Ce génocide nous implique tous. Nous témoignons des crimes de génocide, et nous refusons de les approuver par notre silence.»

Une photographie aérienne prise par un drone montre les destructions causées par l'offensive aérienne et terrestre israélienne à Jabaliya, dans la bande de Gaza, le dimanche 16 février 2025. [AP Photo/Mohammad Abu Samra]

La lettre suit une lettre ouverte signée par plus de 800 avocats, universitaires et juges à la retraite britanniques, dont d'anciens juges de la Cour suprême, Lord Sumption et Lord Wilson, et d'anciens juges de la Cour d'appel, Sir Stephen Sedley, Sir Anthony Hooper et Sir Alan Moses.

Les magistrats ont appelé Starmer à imposer des sanctions aux ministres du gouvernement israélien et à d'autres figures civiles et militaires «raisonnablement soupçonnées d'implication dans des conduites illégales», à réexaminer les liens commerciaux existants avec Israël, à imposer des sanctions commerciales et à suspendre une feuille de route pour un partenariat plus étroit entre le Royaume-Uni et Israël. Ils ont accusé Israël d'une «attaque sans précédent contre les Nations Unies» à travers son interdiction de l'UNRWA, l'agence des Nations Unies pour les réfugiés palestiniens, et ses «attaques contre les locaux, les biens et le personnel de l'ONU».

Ils ont même suggéré que le gouvernement initie une action au Conseil de sécurité de l'ONU pour expulser Israël en tant qu'État membre de l'ONU, une action sans précédent, pour ses violations répétées de la Charte des Nations Unies. Ils ont appelé le gouvernement à respecter ses obligations légales internationales fondamentales et à «utiliser tous les moyens disponibles pour garantir un cessez-le-feu immédiat, inconditionnel et permanent à Gaza et pour assurer la reprise urgente, inconditionnelle et sans entrave de l'aide» aux Palestiniens. Ils concluaient en disant: «Votre gouvernement doit agir maintenant, avant qu'il ne soit trop tard».

La semaine dernière, 120 professionnels de l'industrie du film, de la télévision et de la création ont écrit une lettre ouverte à Starmer l'appelant à «Se lever pour la justice et les droits de l'homme. Arrêter toutes les exportations d'armes vers Israël. Se conformer à la Cour internationale de Justice, y compris en interdisant le commerce de biens et services aux colonies. Soutenir la Cour pénale internationale et ceux qui travaillent avec elle. Aider à mettre fin à ce génocide, cette occupation, cet apartheid».

Reflétant le refus de nombreux Juifs britanniques de s'identifier à la guerre d'anéantissement qu’Israël mène contre les Palestiniens, 36 membres du Board of Deputies of British Jews, fort de 300 membres – la plus grande organisation affirmant représenter les Juifs britanniques et fervente supporter de l'État sioniste—ont rompu les rangs. Ils ont écrit une lettre ouverte publiée dans le Financial Times très critique de la fin unilatérale du cessez-le-feu par Israël et de la reprise de la guerre, provoquant une réponse furieuse du Board.

« En tant que Juifs britanniques, nous ne pouvons plus rester silencieux sur la guerre à Gaza »: Lettre au Financial Times, 16 avril 2025 (capture d'écran) [Photo by Financial Times]

Les signataires ont déclaré qu'ils ne pouvaient plus «fermer les yeux ou rester silencieux» face à la guerre à Gaza. «L'inclination à détourner les yeux est forte, car ce qui se passe est insupportable, mais nos valeurs juives nous obligent à nous lever et à parler. Ce gouvernement israélien, le plus extrémiste de tous, encourage ouvertement la violence contre les Palestiniens en Cisjordanie, étrangle l'économie palestinienne et construit plus de nouvelles colonies que jamais... L'âme d'Israël est en train d'être arrachée et nous, membres du Board of Deputies of British Jews, craignons pour l'avenir de l'Israël que nous aimons et auquel nous sommes si étroitement liés.»

L'un des signataires, Daniel Grossman, député pour l'Union des étudiants juifs et étudiant à l'Université de Bristol, a démissionné du Board of Deputies of British Jews en raison de l'échec de ses dirigeants à critiquer explicitement «l'assaut génocidaire continu du gouvernement israélien sur Gaza». Il a qualifié les récentes réunions entre dirigeants du Board et ministres et responsables israéliens, dont le ministre des Affaires étrangères Gideon Saar, d’«intenables » et de « faillite morale». Les dirigeants du Board avaient «échoué à agir de manière éthique et aussi à représenter la diversité croissante des opinions» sur Gaza au sein des communautés juives.

Naa’mod, une organisation juive britannique qui s'oppose à l'occupation des territoires palestiniens par Israël et qui est critique à l'égard du Board of Deputies, a accueilli favorablement la démission de Grossman, tandis qu'une lettre écrite par 30 rabbins de synagogues réformistes et libérales au Financial Times déclarait qu'ils ne pouvaient plus «fermer les yeux ou rester silencieux».

[Article paru en anglais le 29 mai 2025]

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