Perspectives

Trump visite le Capitole afin d’encourager les votes pour les dépenses militaires et la contre-révolution sociale

Le président Donald Trump est rejoint par le président de la Chambre des représentants, Mike Johnson (républicain – Louisiane), à gauche, alors qu'il s'entretient avec les journalistes à son départ du Capitole après une réunion avec la Conférence républicaine de la Chambre des représentants, le mardi 20 mai 2025, à Washington DC. [AP Photo/Rod Lamkey, Jr.]

Mardi, le président Donald Trump a rencontré les républicains de la Chambre des représentants au Capitole afin d'obtenir leur soutien pour son enveloppe de mesures fiscales et de dépenses, officiellement connu sous le nom de « One Big Beautiful Bill Act » (Un grand et beau projet de loi). Cette monstruosité de plus de 1100 pages est un plan de contre-révolution sociale à l'intérieur du pays et de guerre mondiale à l'étranger que les républicains de la Chambre des représentants veulent mettre en oeuvre avant la fin du mois.

Les efforts déployés par les grands médias pour présenter la législation comme une mesure politique de routine sont un écran de fumée délibéré, destiné à dissimuler l'ampleur historique de l'assaut contre les programmes sociaux. S'il est adopté – il suffit d'une majorité simple dans les deux chambres du Congrès contrôlées par les républicains – le projet de loi aura pour conséquence de priver des millions de personnes, y compris des enfants et des personnes âgées, de soins de santé et de nourriture, condamnant beaucoup d'entre elles à une mort prématurée.

Au centre du budget se trouvent 3800 milliards de dollars de réductions d'impôts, y compris la prolongation permanente des réductions d'impôts accordées par Trump en 2017. Ces mesures maintiendraient le taux d'imposition des sociétés à 21 %, soit moins de la moitié du taux de 46 % en vigueur en 1970, et élimineraient d'autres impôts sur les sociétés.

Pour financer cet immense cadeau aux riches, le projet de loi prévoit des coupes sombres dans des programmes sociaux vitaux, notamment :

  • Les coupes les plus importantes dans l'histoire de Medicaid – le principal assureur des personnes âgées et des pauvres – avec 715 milliards de dollars supprimés sur 10 ans, principalement par le biais de soi-disant « exigences de travail » et d'obstacles punitifs conçus pour priver de couverture des personnes par ailleurs éligibles. Selon le Congressional Budget Office, ces mesures entraîneraient la perte d'accès aux soins de santé pour 8,6 millions de personnes.

  • Entre 300 et 350 milliards de dollars de coupes dans le SNAP (Supplemental Nutrition Assistance Program) sur la même période. Comme pour Medicaid, ces coupes reposent sur des obligations de déclaration onéreuses et des obligations de travail plus sévères, la tranche d'âge pour le travail obligatoire passant de 18-54 ans à 18-64 ans. Elles transfèrent en outre la responsabilité financière aux États, les obligeant à mettre en œuvre leurs propres réductions.

Dans le droit fil de l'attaque bipartisane contre les immigrés, le projet de loi comprend des dispositions visant les immigrés bénéficiaires de Medicaid et de SNAP. Les États qui ne fournissent pas de documents attestant que les bénéficiaires sont des citoyens américains en situation régulière risquent de perdre les fonds de contrepartie fédéraux, ce qui les incitera à refuser purement et simplement l'accès à ces programmes essentiels.

Les milliards supprimés des programmes d'alimentation et de soins de santé destinés à des millions d'enfants et de personnes âgées américains seront consacrés à de vastes dépenses militaires et à l'expansion spectaculaire de la Gestapo des frontières.

Le projet de loi prévoit 150 milliards de dollars de dépenses supplémentaires par rapport au budget militaire standard, sur une période de quatre ans. S'exprimant depuis la Maison-Blanche mardi, Trump a confirmé que 25 milliards de dollars seraient consacrés au système de défense antimissile «Golden Dome », qui combine des volets terrestres et spatiaux. Trump a précisé qu'il ne s'agissait que d'un « acompte », le coût total du programme étant estimé à 175 milliards de dollars.

Le projet de loi prévoit d'autres dépenses militaires importantes, notamment :

  • 4,5 milliards de dollars pour « l'accélération du bombardier à long rayon d'action B-21 ». Le B-21 Raider est un bombardier furtif à longue portée et à capacité nucléaire, conçu pour remplacer les flottes de B-2 et de B-1 en prévision d'une guerre avec la Chine.

  • 4,6 milliards de dollars pour un « deuxième sous-marin de classe Virginia au cours de l'année fiscale 2027 ». Ces sous-marins d'attaque à propulsion nucléaire sont équipés pour les opérations de contre-espionnage, le déploiement de missiles de croisière et la lutte anti-sous-marine.

  • 5,4 milliards de dollars pour « deux destroyers de missiles guidés supplémentaires».

Le budget comprend également ce qui semble être l'augmentation la plus importante du financement de la police et de l'immigration dans l'histoire des États-Unis, allouant environ 70 milliards de dollars à une expansion radicale des agences répressives de l'État. Ce montant comprend 46,5 milliards de dollars pour le prolongement du mur frontalier entre les États-Unis et le Mexique, équipé de caméras, de lumières, de capteurs, de routes et d'un système d'élimination des « espèces envahissantes », ainsi que 4,1 milliards de dollars pour l'embauche de 3000 nouveaux agents de la Border Patrol, 5000 agents des douanes et 10 000 agents supplémentaires de l'Immigration and Customs Enforcement (ICE).

Cette vaste militarisation vise à mettre en œuvre des expulsions de masse et à jeter les bases d'une répression intérieure d'une ampleur sans précédent dans l'histoire moderne des États-Unis, alors que Trump érige une dictature présidentielle.

Dans l'ensemble, le « Big Beautiful Bill » semble avoir été conçu pour confirmer la définition de Friedrich Engels selon laquelle l'État n'est « rien de plus qu'une machine pour l'oppression d'une classe par une autre », alors que la classe dirigeante américaine construit son « corps spécial d'hommes armés » pour se préparer à réprimer la résistance grandissante de la classe ouvrière.

Si les républicains sont les fers de lance de la législation actuelle, le Parti démocrate ne fait rien pour l'arrêter. S'exprimant sur la proposition de budget lundi, le chef de la minorité de la Chambre des représentants, Hakeem Jeffries (démocrate – New York), a laissé aux soi-disant « républicains modérés » le soin de « repousser » le projet de loi. La semaine dernière, la représentante de New York Alexandria Ocasio-Cortez a exhorté ses partisans à « décrocher le téléphone » et à appeler les républicains pour «sauver Medicaid ».

En fait, le Parti démocrate est entièrement d'accord avec cet assaut. Leur opposition à Trump n'est pas fondée sur ces questions, mais sur des questions de politique étrangère : en particulier la conduite de la guerre contre la Russie. Sur le plan intérieur, les deux partis sont unis pour démanteler des programmes essentiels comme Medicaid et SNAP afin de financer des réductions d'impôts pour les milliardaires et un État militaro-policier en expansion constante.

En effet, les attaques contenues dans le projet de loi, y compris les exigences en matière de travail, ne sont pas une nouvelle invention, mais la continuation de décennies de politique bipartisane centrée sur la réduction des programmes sociaux et le transfert du fardeau de la crise sur la classe ouvrière pour financer les richesses et les guerres de l'élite dirigeante.

Près de 28 ans se sont écoulés depuis que le président Bill Clinton a signé le « Personal Responsibility and Work Opportunity Reconciliation Act », déclarant : « Aujourd'hui, nous mettons fin à l'aide sociale telle que nous la connaissons. » Cette loi a mis fin au programme d'aide aux familles ayant des enfants à charge, en le remplaçant par l'aide temporaire aux familles nécessiteuses, et a imposé des exigences de travail comme condition pour recevoir des prestations limitées.

Trump supervise maintenant ce que le World Socialist Web Site a caractérisé comme le réalignement violent de l'État pour qu’il corresponde au caractère oligarchique de la société américaine.

La classe dirigeante américaine est confrontée à la réalité de son déclin économique prolongé et à l'escalade de la crise fiscale, exprimée par la récente décote de la dette américaine. Au cours des trois dernières décennies, les niveaux d'endettement des États-Unis ont explosé en raison d'une combinaison de dépenses militaires massives et de renflouements sans fin de l'oligarchie financière.

Ce phénomène s'est considérablement accéléré à la suite de l'effondrement financier de 2008-2009, puis du krach boursier de mars 2020, au début de la pandémie de COVID-19. En réponse, des majorités écrasantes dans les deux partis capitalistes ont voté pour des renflouements de milliers de milliards de dollars pour les grandes banques et les fonds spéculatifs, tandis que les travailleurs, les petites entreprises et leurs familles se retrouvaient sans abri et sans ressources.

Aujourd'hui, alors que la dette américaine approche les 37 000 milliards de dollars, la réponse de l'oligarchie financière capitaliste est de se décharger le plus possible de la crise sur le dos de la classe ouvrière. Tout est sous le couperet, non seulement Medicaid, mais aussi Medicare, la sécurité sociale, l'éducation publique, la réglementation des entreprises et tout ce qui nuit aux profits et à la richesse de la classe dirigeante.

La classe ouvrière ne peut pas endurer passivement cet assaut historique contre sa position sociale et économique, et elle ne le fera pas. Un peu plus de 100 jours après le début de la deuxième administration de Trump, des manifestations ont déjà eu lieu dans tout le pays et des votes d'autorisation de grève quasi quotidiens ont été votés par les travailleurs à travers le pays. C'est cette puissante force sociale – la classe ouvrière internationale – qui doit être mobilisée pour mettre fin au pillage des ressources de la société pour l'enrichissement d'une oligarchie financière criminelle.

Le « Big Beautiful Bill » va générer d'énormes chocs, y compris parmi les sections de travailleurs qui ont voté pour Trump mais qui n'ont pas voté pour leur propre appauvrissement. Les milliardaires et les entreprises, cependant, ne renonceront pas à leur richesse sans se battre. La classe ouvrière, armée des leçons de l'histoire et dirigée par une direction socialiste révolutionnaire, doit exproprier les oligarques et placer les vastes richesses de la société sous le contrôle démocratique de la classe ouvrière elle-même.

Il est impossible de défendre les droits sociaux et démocratiques fondamentaux sans mener une lutte sans compromis contre le système capitaliste. Tous ceux qui sont déterminés à lutter contre l'austérité, la guerre et la dictature doivent rejoindre le Parti socialiste de l'égalité et aider à construire la direction révolutionnaire nécessaire pour les batailles à venir.

(Article paru en anglais le 21 mai 2025)

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