L'anxiété concernant leur emploi grandit chez les travailleurs de l'automobile à mesure que l'impact des politiques de guerre commerciale de Trump se propage dans l'industrie automobile mondiale.
Vendredi, General Motors a annoncé qu'elle licencierait 750 travailleurs dans son usine d'assemblage d'Oshawa au Canada à l'automne en raison des droits de douane américains. L'usine, qui emploie 3000 travailleurs, fera passer ses activités de trois à deux équipes. Selon le syndicat canadien de l'automobile Unifor, 1500 autres travailleurs perdront leur emploi chez des fournisseurs et dans d'autres secteurs connexes.
La production est également temporairement arrêtée cette semaine à l'usine d'assemblage de minifourgonnettes Stellantis à Windsor, au Canada, ayant un impact sur 3800 travailleurs. Cet arrêt d'une semaine est la deuxième fois en un peu plus d'un mois que la production est interrompue dans cette usine. Elle avait déjà été arrêtée pendant deux semaines en avril, Stellantis ayant évalué l'impact des droits de douane de 25 % imposés par les États-Unis sur les véhicules importés.
Alors que l'on craint que les droits de douane ne déclenchent une vague de faillites, de fermetures et de licenciements collectifs dans l'industrie nord-américaine des pièces détachées, le fournisseur de sièges automobiles Adient a annoncé qu'il fermerait deux usines dans le Tennessee d'ici le 27 juin, après que GM a annulé son contrat de production de sièges pour Cadillac construits dans une usine de Spring Hill. Les fermetures dans les comtés de Maury et de Henderson toucheront 400 travailleurs, qui sont membres du syndicat United Auto Workers (UAW).
Début avril, 900 travailleurs ont été temporairement licenciés dans cinq usines Stellantis, dont les usines d'emboutissage Sterling et Warren dans la région métropolitaine de Détroit, ainsi que deux usines de transmission et une usine de moulage à Kokomo, dans l'Indiana. Ces usines approvisionnent les usines d'assemblage Stellantis de Windsor, au Canada, et de Toluca, au Mexique, où le constructeur automobile a temporairement arrêté la production après que Trump a imposé des droits de douane de 25 % sur toutes les importations de voitures le 3 avril.
En outre, Volvo Group North America a annoncé que 1000 des 7000 travailleurs des usines Volvo et Mack Trucks en Pennsylvanie, au Maryland et en Virginie seraient temporairement licenciés dans les mois à venir en raison de l'impact des droits de douane.
Une ouvrière d’expérience de Sterling Stamping a déclaré au WSWS au cours du week-end :
La rumeur a circulé dans l'usine que nous allions être licenciés à partir de lundi. Même beaucoup de ceux qui ont voté pour Trump disent maintenant qu'il faut annuler ces foutus droits de douane. Personne ne va dépenser 5000 dollars de plus que le prix normal d'un VUS ou d'une voiture. Nous n'avons pas reçu de lettres de licenciement, mais tout le monde est inquiet.
Elle a dénoncé le soutien apporté par le président de l'UAW, Shawn Fain, aux mesures de guerre commerciale de Trump, en déclarant :
Fain a vraiment fait un 180 degrés. Il a appuyé Biden et Harris, et maintenant il soutient Trump. Dans les usines, nous en avons fini avec Fain.
Face à l'opposition qui monte contre les licenciements et les mesures dictatoriales du président fasciste, Trump s'est tourné vers les partisans de longue date du nationalisme économique au sein de la bureaucratie syndicale pour obtenir de l’appui. C'est ainsi qu'il a choisi d'organiser un rassemblement marquant les 100 premiers jours de sa présidence la semaine dernière à Warren, dans le Michigan, un centre de l'industrie automobile, juste au nord de Détroit. Mais cela s'est retourné contre lui, les manifestants anti-Trump à l'extérieur de la salle étant plus nombreux que ses partisans à l'intérieur.
Lors d'une interview diffusée dimanche dans le cadre de l'émission « Meet the Press » de la chaîne de télévision NBC, Trump s'en est pris à Fain :
Vous savez que le syndicat, le chef du syndicat, qui n'était pas un de mes fans, Fain. [...] Il ne m'a pas soutenu. Les Teamsters l'ont fait. Beaucoup de gens l'ont fait. Beaucoup de syndicats l'ont fait. Mais pas lui. Il ne pouvait pas me supporter. Maintenant, il dit : « Wow, ce que Trump a fait pour l'industrie automobile, je n'arrive pas à y croire. »
Je suppose qu'il va probablement dire maintenant – la prochaine chose qu'il peut dire, c'est : « Je soutiens cet homme. C'est le meilleur que j'aie jamais vu. » Il n'arrive pas à croire que c'est arrivé. Il a déclaré : « Cela fait 40 ans que nous attendons que quelqu'un fasse ce que Trump est en train de faire. »

Loin de s'opposer aux attaques qui se multiplient contre l'emploi et à la menace d'une récession économique majeure, la bureaucratie de l'UAW se joint aux efforts de Trump pour diviser les travailleurs américains de leurs frères et soeurs au Canada, au Mexique, en Chine et dans d'autres pays engagés dans des luttes contre les mêmes constructeurs automobiles mondiaux. Fain s'est également fait l'écho de l'argument de Trump selon lequel le « rapatriement » de l'industrie manufacturière américaine est essentiel pour la « défense nationale », c'est-à-dire pour préparer la guerre contre la Chine.
Dans l'usine d'assemblage Warren Truck, située à proximité, la bureaucratie de l'UAW a sanctionné le licenciement de plus de 1500 travailleurs en octobre dernier. Les dirigeants de Stellantis, avec le soutien des responsables syndicaux locaux, avaient constamment menacé de fermer cette usine vieille de 90 ans si les travailleurs n'augmentaient pas leur productivité et ne réduisaient pas leur taux d'absentéisme, ce dernier étant largement dû à des horaires et une charge de travail épuisants et à l'absence de congés.
Le mois dernier, Stellantis a mis 1000 travailleurs au chômage technique pendant un mois, apparemment en raison de perturbations dans la production de moteurs expédiés depuis Saltillo, au Mexique. Le seul modèle actuellement produit dans l'usine est la Jeep Grand Wagoneer, qui se vend lentement et très cher, entre 85 000 et 121 000 dollars.
Un ouvrier chevronné de Warren Truck a déclaré au WSWS :
Nous n'avons aucune promesse d'avenir pour l'instant, jusqu'à l'année prochaine peut-être. Je travaille dans la deuxième équipe, mais j'ai été licencié ou j'ai eu des semaines de travail plus courtes pendant trois mois. La première équipe est en congé jusqu'au 12 mai. On nous a déjà dit qu'ils ne reviendraient peut-être pas. Toute cette année, la première équipe n'a pas eu une semaine complète de travail ou 8 heures complètes. Ça m'inquiète, il n’y a pas de moteurs disponibles.
Après n'avoir rien fait pour s'opposer aux licenciements de Warren Truck, la bureaucratie de l'UAW tente d'attiser le chauvinisme anti-mexicain en exigeant que Stellantis annule ses projets d'expansion de la production de la nouvelle camionnette 1500 Ram à l'usine de Saltillo. La majeure partie des pick-up Ram sont construits à l'usine d'assemblage de Sterling Heights, située à proximité, et la production excédentaire était assurée par Warren Truck jusqu'à l'année dernière. Selon la bureaucratie de l'UAW, le seul moyen de défendre les emplois des ouvriers américains de l'automobile est de détruire les emplois des travailleurs au Mexique, au Canada, en Chine et dans d'autres pays.
En opposition à cela, Will Lehman, un ouvrier de Mack Trucks qui s'est présenté comme candidat socialiste à la présidence de l'UAW contre Fain en 2022, appelle à l'expansion de l'Alliance ouvrière internationale des comités de base (IWA-RFC) pour unir les travailleurs au-delà des frontières, abolir les bureaucraties syndicales pro-capitalistes et nationalistes et transférer le pouvoir aux travailleurs sur le lieu de travail.
Ce n'est qu'ainsi que les travailleurs pourront lutter pour défendre leurs emplois, notamment dans les usines Volvo-Mack Trucks de Pennsylvanie, du Maryland et de Virginie, où 1000 des 7000 travailleurs risquent d'être licenciés pour cause de tarifs douaniers au cours des prochains mois,
S'exprimant lors du rassemblement international en ligne du Premier mai, le samedi 3 mai, Lehman a déclaré :
Le président Shawn Fain a passé des mois à s'acoquiner avec Trump et à approuver ses tarifs nationalistes. Il n'y a rien de nouveau à ce qu'un dirigeant syndical américain promeuve l'impasse du nationalisme. Pendant des décennies, les syndicats l'ont encouragé sans sauver un seul emploi. Le nationalisme est un poison pour les travailleurs. Il n'a conduit qu'à la destruction d'emplois, des divisions entre les travailleurs et une plus forte exploitation dans une course vers le bas. Le nationalisme dresse les travailleurs les uns contre les autres, détournant l'attention de la véritable guerre de classe, la guerre de l'oligarchie contre la classe ouvrière.
S'opposant à la guerre commerciale et à la guerre contre la Chine, Lehman a déclaré :
La classe ouvrière chinoise, immensément puissante, partage les mêmes intérêts de classe. Tout comme les travailleurs américains, les travailleurs chinois ont fait preuve d'un immense désir de se battre lors des récentes grèves. Si nous voulons gagner dans les luttes à venir, nous ne pouvons pas être divisés par rapport à nos collègues des autres pays. Au contraire, nous devons créer des liens d'unité qui transcendent les frontières nationales.
Le travail collectif des ouvriers de l'automobile du monde entier est lié à un processus de production mondiale synchronisée, ce qui rend absurde toute référence à des véhicules « fabriqués aux États-Unis » ou à des voitures et camions d'une autre nationalité.
Automotive News a fourni une description du système byzantin et largement arbitraire mis en place par l'administration Trump pour déterminer la valeur du contenu « non américain » des composants automobiles qui traversent plusieurs fois les frontières des États-Unis, du Mexique et du Canada.
La publication de l’industrie automobile prend l'exemple du parcours d'un piston et des différents droits de douane auxquels il sera soumis selon qu'il sera installé dans un pick-up dont l'assemblage final se fait dans une usine américaine ou mexicaine. L'aluminium brut en provenance du Québec est fondu et coulé en piston à Toronto, traverse la frontière canado-américaine pour être usiné et fini à Détroit, où il est soumis à un tarif douanier de 25 % sur la valeur du piston, qui doit entrer en vigueur le 3 mai. Le piston fini est ensuite expédié de Détroit à Windsor pour l'installation du moteur, où il n'est pas soumis à un droit de douane car les pièces automobiles sont exemptées des droits de douane canadiens.
Si le moteur « fabriqué au Canada » est envoyé à une usine d'assemblage de camionnettes au Mexique, il ne sera pas soumis à des droits de douane parce que le moteur traverse les États-Unis pour arriver au Mexique et que le Canada et le Mexique appliquent des politiques de libre-échange dans le cadre de l'ACÉUM (Accord Canada–États-Unis–Mexique). Enfin, le pick-up assemblé traverse la frontière États-Unis–Mexique en vue d'être livré à un concessionnaire. Dans ce cas, il sera soumis à un droit de douane de 25 % sur le contenu non américain du véhicule.
Si le moteur « fabriqué au Canada » retourne aux États-Unis pour être installé dans une camionnette assemblée aux États-Unis, il sera soumis à un droit de douane de 25 % sur sa valeur, car un moteur est un composant désigné du groupe motopropulseur. Automotive News rapporte :
Si le véhicule lui-même n'a pas été soumis à des droits de douane, il a maintenant des intrants qui peuvent avoir été soumis à des droits de douane à plusieurs reprises.
Après un lobbying intense de la part des constructeurs automobiles, qui ont annoncé des prévisions de bénéfices réduits en raison des droits de douane, Trump a signé le 29 avril un décret qui accorde une aide partielle, du moins pour l'instant, aux constructeurs automobiles qui respectent les conditions du pacte commercial nord-américain ACÉUM. Ces entreprises pourront désormais demander une compensation pour les droits de douane sur les pièces détachées pendant deux ans, selon le décret.
Dans le même temps, le décret met fin au « cumul » des droits de douane sur les pièces automobiles qui étaient soumises à la fois au droit de douane de 25 % sur la valeur de transaction de la pièce et au droit de douane de 25 % sur la valeur de l'acier ou de l'aluminium contenu dans la pièce.
Trump a écrit dans le décret :
Dans la mesure où ces droits de douane s'appliquent au même article, ils ne doivent pas avoir d'effet cumulatif (ou « s'empiler » les uns sur les autres) parce que le taux de droit résultant d'un tel empilement dépasse ce qui est nécessaire pour atteindre les objectifs politiques visés.
Toutefois, les « véhicules importés » continueront d'être taxés de 25 %, tout comme les composants provenant de la plupart des autres pays.
Selon Bloomberg, ces droits de douane
devraient augmenter considérablement les coûts des constructeurs automobiles, bouleverser les chaînes d'approvisionnement et faire grimper le prix des voitures, qui avoisine déjà les 50 000 dollars en moyenne. General Motors Co. a déclaré jeudi qu'elle s'attendait à ce que le régime tarifaire de Trump lui coûte jusqu'à 5 milliards de dollars, même après que le président a assoupli certains aspects des droits de douane.
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(Article paru en anglais le 5 mai 2025)